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La résistance

Apprenez-en plus sur ce que les parents et les élèves disaient contre le système des pensionnats autochtones ainsi que sur la façon dont ils agissaient.  
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This resource is intended for educators in Canada who are teaching in French. Cette ressource est destinée aux enseignants en Canada qui enseignent en langue Française.

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  • Culture & Identity
  • Resistance

Peu après le commencement du système de pensionnats , des parents, qui pour la plupart étaient réticents à envoyer leurs enfants loin de la maison, ont commencé à exprimer leur mécontentement par rapport aux écoles. Cela était particulièrement vrai pour les diplômés de ces écoles, des gens qui avaient vécu eux-mêmes le traitement sévère et parfois abusif réservé aux élèves par le personnel des pensionnats. 1  De nombreux leaders autochtones croyaient que les pensionnats constituaient une violation des traités entre le gouvernement et les Premières Nations . Lorsque le gouvernement a signé ces traités, il a promis d'éduquer les enfants dans les réserves . Même ceux qui voulaient une éducation du gouvernement n'avaient pas envisagé une situation où les enfants leur seraient enlevés pour subir une transformation culturelle complète. 2  Toutefois, la loi était claire : après 1920, tous les enfants des Premières Nations devaient recevoir une éducation. Dans de nombreux cas, les parents étaient forcés de laisser aller leurs enfants sous la menace. Les lettres d'élèves, même si elles étaient censurées par le personnel de l'école, parlaient aux parents des mauvaises conditions et de la discipline sévère. Les parents autochtones se plaignaient ensuite à un missionnaire ou au ministère des Affaires indiennes. Parfois, les plaintes débouchaient sur une enquête sur l'école visée et sur certaines mesures, comme une augmentation de la nourriture ou le congédiement des membres du personnel fautifs. Parfois, des membres de la famille ou de la communauté allaient directement chez le directeur pour exiger que leurs préoccupations soient abordées.

Certains parents sont même allés plus loin et ont retiré leurs enfants des pensionnats pour les placer dans des écoles de jour  sur les réserves ou dans des écoles de dénomination différente qui selon eux, allaient être plus clémentes envers les enfants. Certaines familles cachaient même leurs enfants lorsque les agents des Indiens venaient les chercher. L'historien des pensionnats James R. Miller a réalisé une entrevue avec un homme qui a fréquenté l'établissement Whitehorse Baptist Mission School de 1951 à 1953. La grand-mère de l'homme l'a protégé des missionnaires lorsqu'ils sont venus à la maison pour le chercher. Il se souvient :

Ma grand-mère était très, très fâchée. Je me rappelle clairement la troisième fois, ma dernière année à l'école Baptist Mission, lorsque ces missionnaires sont revenus pour m'emmener; à cette époque, je vivais avec ma grand-mère et ma tante... qui était aveugle. En un sens, elles étaient ma famille immédiate... Lorsque ces missionnaires sont venus à la porte et ont dit : « Nous avons l'autorisation de prendre [nom effacé] pour l'emmener à la Whitehorse Baptist Mission School », et ils ont essayé de m'entraîner hors de la maison; je m'accrochais aux jambes de ma grand-mère. Je pleurais, bien entendu, et ma grand-mère était très en colère. Elle était assez vieille, probablement dans la soixantaine.

Je me souviens qu'elle a saisi sa tut comme nous appelions sa canne, et qu'elle a commencé à frapper sur le dos d'un missionnaire, un missionnaire blanc, en criant « Laissez mon petit-fils tranquille. Vous ne l'emmènerez nulle part ». Et ma tante Pat est sortie, elle était déjà aveugle à l'époque, en répétant la même chose pour appuyer sa mère. Elle disait qu'ils ne pouvaient pas emmener cet enfant, peu importe l'autorisation qu'ils avaient. Ils n'avaient aucun document écrit à présenter... Ma grand-mère m'a défendu, et elle a été capable de sortir ces missionnaires blancs de la maison. Et ils sont finalement partis en acceptant la défaite. Et en laissant derrière eux cet enfant indien qui n'est jamais retourné à la Whitehorse Baptist Mission School par la suite. 3

Les enfants exprimaient leur mécontentement, comme ils ont souvent tendance à le faire, en refusant de coopérer avec les autorités scolaires et par de petits gestes de défi. Ils affublaient parfois leurs enseignants de surnoms moqueurs dans leur langue maternelle, ce qui était amusant pour eux, car les enseignants visés ne comprenaient pas les langues autochtones. Ainsi, ils se moquaient de l'autorité du système, tout en gardant vivante la chose que les écoles cherchaient à éradiquer. Le fait de continuer à parler leur langue et de choisir de ne pas l'oublier, à l'école et à la réserve, était souvent un autre geste de défi conscient. Lillian Elias, qui a fréquenté un pensionnat à Aklavik, une région des Territoires du Nord-Ouest, raconte son refus qu'on lui fasse oublier sa langue :

Quand ils nous malmenaient, nous les filles, c’est là que j’avais vraiment peur. Moi, je ne me suis jamais fait brasser, mais on m’a mise en punition quelques fois parce que j’avais dit un mot dans ma langue. Je pense que c’est pour ça que je me suis battue pour garder ma langue, parce qu’ils ne voulaient pas que je la parle. Je me disais : « Vous n’allez pas m’empêcher de parler ma langue ». Alors, je l’ai réapprise rapidement quand je suis sortie de là. Je l’ai réapprise avec mes grands-parents. Je vivais avec mes grands-parents à cette époque. Mes grands-parents étaient là, avec ma mère et mon père et mes tantes et mes oncles. Nous étions comme une petite communauté... Je suis devenue forte. Je suis très puissante, je dois l’avouer, et je suis forte aujourd’hui parce que, autrefois, quand je refusais de faire ceci ou cela, c’est pour cette raison que je n’ai pas perdu ma langue, parce que je ne les laissais pas me battre. Je n'allais pas les laisser tout me prendre. Ils pouvaient m’arracher ma fierté et des choses comme ça, mais pas ma langue. 4

Quelques élèves refusaient également de coopérer avec les enseignants et le personnel en ne participant pas en classe, en ignorant leurs travaux scolaires ou en ne mangeant pas leurs repas. On assistait souvent à ce que Celia Haig-Brown définit comme le « crime organisé ». 5  Parmi ces crimes, il y avait le vol, surtout de nourriture dans les cuisines. Les élèves qui avaient accès au stock de nourriture volaient des aliments et avaient développé un système de troc. Bien que ces gestes étaient motivés par la faim et qu'ils engendraient de la culpabilité par la suite, de nombreux étudiants étaient solidaires les uns envers les autres et ne signalaient pas ces actes.

L'un des actes les plus extrêmes pour ceux qui n'essayaient pas se s'enfuir était l'incendie volontaire. Dans de rares cas, les étudiants brûlaient l'école, comme ce fut le cas à l'Institut mohawk, qui a été incendié deux fois. 6  Les élèves croyaient qu'incendier leur établissement était une solution à leurs problèmes, car le feu allait détruire l'école et entraîner sa fermeture, permettant ainsi aux élèves de partir, ou entraînerait l'expulsion des coupables à qui l'on interdirait de revenir. 7

Ces gestes permettaient aux parents et aux élèves de parler, et d'agir contre un système qui les empêchait de prendre leurs propres décisions sur leur mode de vie et d'éducation.

Questions de mise en relation

  1. Le titre de cette lecture est « La résistance ». Que signifie ce mot dans le contexte des pensionnats autochtones? Comment décririez-vous les comportements de cette lecture? Résistance? Défi? Désobéissance? Quelle est la ligne entre la résistance et le crime?
  2. Quelle forme prenait la résistance des parents et des élèves dans les pensionnats? Dans quelle mesure cette résistance était-elle efficace? Qu'est-ce que les Peuples Autochtones pouvaient faire davantage pour protester contre les décisions du gouvernement? Qu'est-ce qui rendait la protestation et la résistance si difficiles?
  3. Selon vous, qu'est-ce qui pousse les gens et les groupes à poser des gestes de résistance malgré les risques comme les châtiments corporels?
  • système de pensionnatsAu début de 1883, le gouvernement fédéral cherchait un système pour enrôler les enfants autochtones dans les écoles. Le système de pensionnats faisait partie d'un programme plus vaste du gouvernement visant à assimiler les Peuples Autochtones à la société colonisatrice par le biais de l'éducation. S'appuyant presque exclusivement sur les églises pour fournir des enseignants, des administrateurs et des instructeurs religieux, le système a été gravement sous-financé et marqué par des normes inférieures d'éducation et de réussite : négligence, malnutrition, abus et maladies étaient monnaie courante. Au cours des dernières années, des chercheurs ont découvert que certaines écoles menaient également des expériences médicales dangereuses. On estime que plus de 6 000 élèves sont morts en raison de la maladie ou des abus pendant qu'ils fréquentaient de force ces établissements. Sur une période de 150 ans, le gouvernement et les églises ont dirigé près de 150 écoles où environ 150 000 jeunes autochtones ont été inscrits de force.
  • 1Elizabeth Graham, éd., The Mush Hole: Life at Two Indian Residential Schools (Ontario: Heffle Publishing, 1997), 9; voir également le rapport du Rev. James Musgrove, directeur de Mt. Elgin, 234–35.
  • Premières NationsLes Premières Nations vivent en Amérique du Nord depuis des dizaines de milliers d'années. Aujourd'hui, le terme fait référence aux quelque 617 communautés différentes, traditionnellement formées d'environ 400 personnes. Ces nations affichent une grande richesse et une grande diversité d'identités, de cultures et de coutumes. Plusieurs voient l'Amérique du Nord comme leur patrie traditionnelle et ne reconnaissent pas certains aspects de la souveraineté des États-Unis et du Canada. Avec les Métis et les Inuits, les Premières Nations font partie d'un plus grand groupe officiellement appelé Peuples Autochtones du Canada.
  • réservesPrincipal outil d'une stratégie coloniale typique, les réserves étaient de petites zones pratiquement inhabitables où les colonisateurs cherchaient à gérer les peuples qu'ils dépossédaient. Au Canada, dans les années 1850, une série de lois a été adoptée pour redéfinir les frontières des collectivités des Premières Nations, leurs propriétés et leur occupation du territoire, ce qui a accru la pression de déménager dans des réserves. Le manque d'investissements et les mauvais services gouvernementaux ont exacerbé l'isolement des Premières Nations, ce qui a entraîné le déclin économique de plusieurs réserves, et a fait augmenter le taux de violence et les crimes dans celles-ci.
  • 2Megan Sproule-Jones, « Crusading for the Forgotten: Dr. Peter Bryce, Public Health, and Prairie Native Residential Schools », Bulletin canadien d'histoire de la médecine 13 (1996), 208.
  • écoles de jourEn plus des pensionnats et des écoles industrielles, les écoles de jour faisaient partie du système de pensionnats pour les enfants autochtones au Canada. Souvent situées sur les réserves, ces écoles ont accueilli environ les deux tiers des élèves autochtones tout au long de l'histoire du système. Elles étaient dirigées par les autorités municipales et les églises, et elles visaient les mêmes buts que les pensionnats autochtones, soit la christianisation et l'assimilation. De nombreux problèmes et abus relevés dans les pensionnats étaient également le lot des écoles de jour.
  • 3Cité dans James R. Miller, Shingwauk’s Vision: A History of Native Residential Schools (Toronto: University of Toronto Press, 1996), 343.
  • 4Lillian Elias, « We Were So Far Away: The Inuit Experience of Residential Schools », Fondation autochtone de l'espoir. Reproduit avec l'autorisation de la Fondation autochtone de l'espoir.
  • 5Celia Haig-Brown, Resistance and Renewal: Surviving the Indian Residential School (Vancouver: Arsenal Pulp Press, 2002), 102.
  • 6Elizabeth Graham, éd., The Mush Hole: Life at Two Indian Residential Schools (Waterloo, Ontario: Heffle Publishing, 1997), 100.
  • 7Elizabeth Graham, éd., The Mush Hole: Life at Two Indian Residential Schools (Waterloo, Ontario: Heffle Publishing, 1997), 23, 31.

How to Cite This Reading

Facing History & Ourselves, "La résistance," last updated October 29, 2019.

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— Claudia Bautista, Santa Monica, Calif