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Le rôle des églises

Obtenez un aperçu du rôle complexe qu’a joué l’église chrétienne dans le système des pensionnats autochtones.    
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  • Culture & Identity
  • Human & Civil Rights

L'objectif déclaré des pensionnats autochtones était de pousser les Peuples Autochtones au Canada à adopter les valeurs occidentales et le christianisme (ces deux ensembles de valeurs étant pratiquement inséparables à cette époque). Aux yeux de plusieurs responsables officiels, l'entité qui pouvait et allait permettre un changement aussi rapide était l'église chrétienne. Des missionnaires de toutes les dénominations ont épousé la cause de la christianisation et de la civilisation des Peuples Autochtones au Canada bien avant le rapport Davin en 1879. En fait, dans les années 1880, il y avait déjà quatre pensionnats dirigés par l'église en opération. 1  La frustration par rapport aux écoles de jour  et aux autres œuvres missionnaires a mené toutes les dénominations chrétiennes à appuyer le modèle des pensionnats ou des écoles résidentielles. Au cours des décennies qui allaient suivre, le gouvernement a transféré la direction des pensionnats aux églises catholiques romaine et anglicane. 2  À cette époque, la plupart des personnes de descendance européenne étaient d'avis que le christianisme et la civilisation se soutenaient mutuellement (certains les considéraient même comme des synonymes). Dès 1852, le Rev. Samuel Rose, directeur du pensionnat Mt. Elgin à ce moment, explique :

Je vois [l'éducation de ces] jeunes comme un travail ayant un caractère peu ordinaire; une éducation d'une importance solennelle pour son lien avec l'avenir, avec les moments à venir... Ces jeunes formeront la classe dont les histoires constitueront une époque de la plus haute importance dans l'histoire des nations auxquelles ils appartiennent... Cette classe donnera naissance à une génération, qui perpétuera les us et coutumes de ses ancêtres, ou qui sera intellectuellement, moralement et religieusement élevée, prendra sa place au sein des nations améliorées et intelligentes de la terre, sa place dans le grand théâtre du monde; ou encore, si elle ne souhaite pas obtenir les compétences nécessaires pour prendre sa place et faire sa part, sera rejetée et poussée hors de la scène et disparaîtra! 3

Un mémoire à la Convention des directeurs catholiques de 1924 exprime des sentiments semblables :

Toutes les véritables civilisations doivent être fondées sur le droit moral, que seule la religion chrétienne peut offrir. La superstition païenne ne peut pas suffire... à pousser les Indiens à pratiquer les vertus de notre civilisation et à éviter les vices qui y sont liés. Plusieurs personnes souhaitent que nous approuvions les danses des Indiens et leurs festivals; mais leurs habitudes, qui sont le résultat d'un mode de vie facile et libre, ne sont pas compatibles avec la lutte intense pour la vie que notre condition sociale exige. 4

Les ecclésiastiques et les femmes qui occupaient des rôles d'administration et d'enseignement dans les écoles se voyaient souvent comme une force protectrice pour les Peuples Autochtones sans tenir compte du point de vue des cultures de leurs élèves. En 1911, un rapport de la Commission méthodiste de l'Alberta a dit ce qui suit :

« L'Indien est l'enfant faible dans la famille de notre nation et pour cette raison, il doit recevoir la sympathie et la coopération chrétienne... [N]ous sommes convaincus que le seul espoir de nous acquitter de cette obligation envers nos frères indiens est de passer par les enfants; ainsi, il faut donner la priorité à l'éducation. » 5

Un rapport de 2012 de la Commission de vérité et réconciliation  explique le rôle compliqué des églises :

Pour les missionnaires tant catholiques que protestants, les croyances spirituelles autochtones n’étaient guère plus que de la superstition et de la sorcellerie. En Colombie-Britannique, William Duncan de la Church Missionary Society déclarait : « Je ne pourrais mieux décrire les conditions de vie de ces gens qu’en les qualifiant de païennes et de sauvages ». Ce sont les missionnaires qui ont été les fers de lance de la campagne visant à interdire aux Indiens de participer à certaines cérémonies sacrées telles que la cérémonie du potlatch sur la côte ouest et celle de la danse du soleil dans les Prairies. Ainsi, en Colombie-Britannique, en 1884, les missionnaires catholiques romains militèrent en vue de faire interdire la cérémonie du potlatch en disant que nombre des familles qui y participaient en étaient tellement appauvries qu’elles devaient retirer leurs enfants de l’école afin qu’ils les accompagnent en plein hiver pour les aider à trouver de la nourriture.

Tout en étant, d'un côté, engagés dans une guerre contre la culture autochtone, de l’autre, les missionnaires intervenaient souvent afin de protéger et de promouvoir les intérêts des Autochtones dans le cadre de leurs tractations avec le gouvernement et les colons. Nombre d’entre eux apprirent des langues autochtones et célébraient les cérémonies religieuses dans ces langues dans les pensionnats. Ces efforts furent bien récompensés : selon le recensement de 1899, 70 000 des 100 000 Indiens du Canada se disaient chrétiens. 6

  • 1D'autres origines remontent jusqu'aux expériences éducatives pré-confédération en Europe et au réseau d'écoles industrielles et missionnaires aux États-Unis et au Canada. Voir John S. Milloy, A National Crime: The Canadian Government and the Residential School System (Winnipeg: University of Manitoba, 1999), 13–14.
  • écoles de jourEn plus des pensionnats et des écoles industrielles, les écoles de jour faisaient partie du système de pensionnats pour les enfants autochtones au Canada. Souvent situées sur les réserves, ces écoles ont accueilli environ les deux tiers des élèves autochtones tout au long de l'histoire du système. Elles étaient dirigées par les autorités municipales et les églises, et elles visaient les mêmes buts que les pensionnats autochtones, soit la christianisation et l'assimilation. De nombreux problèmes et abus relevés dans les pensionnats étaient également le lot des écoles de jour.
  • 2Commission de vérité et réconciliation du Canada, Ils sont venus pour les enfants, 15. Les deux plus grandes organisations religieuses derrière les pensionnats étaient Les missionnaires oblats de Marie-Immaculée (église catholique romaine) et la Church Missionary Society of the Anglican Church (l'Église d'Angleterre). Elles sont devenues les principales organisations derrière le système; l'Église catholique romaine dirigeait 60 % des écoles, l'Église anglicane 25 % et l'Église Unie du Canada (créée en 1925 lors de la fusion de nombreuses dénominations protestantes, notamment les presbytériens, les méthodistes et d'autres dénominations plus petites) dirigeait le reste. Les Jésuites, malgré leur intense travail de missionnariat au Canada (au début) et dans le monde, dirigeaient seulement deux pensionnats après la confédération. Les églises méthodistes et presbytériennes en Angleterre et aux États-Unis dirigeaient également quelques écoles.
  • 3Rev. Rose Report, 1852, dans Elizabeth Graham, éd., The Mush Hole: Life at Two Indian Residential Schools (Ontario: Heffle Publishing, 1997), 230. Accent ajouté.
  • 4Memorandum of the Convention of the Catholic Principals of Indian Residential Schools, Lebert, Saskatchewan, Août 28–29, 1924.
  • 5T. Ferrier, « Report for the Alberta Methodist Commission » 1911, cité dans John Milloy, A National Crime, 28.
  • Commission de vérité et réconciliationLes commissions de vérité et réconciliation sont devenues courantes depuis les années 1970. Elles sont le reflet d'une tendance mondiale à accorder une plus grande attention aux violations de masse des droits de la personne. La plus grande partie du travail d'une commission est axée sur les crimes commis par un gouvernement contre ses propres citoyens. Depuis les années 1970, il y a eu au moins 40 commissions de vérité et réconciliation dans le monde, et certaines sont encore actives aujourd'hui. Les commissions de vérité comportent un processus multidimensionnel conçu pour aider les victimes à surmonter l'injustice et le traumatisme historiques et à se réconcilier avec les personnes qui leur ont fait du mal. Faisant partie de ce que les experts appellent la justice transitionnelle, les commissions de vérité et réconciliation comprennent habituellement des éléments de recherche de la vérité, de justice et de réconciliation. Établie en vertu de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, la Commission du Canada a commencé à recueillir les témoignages des Survivants et des Survivantes et l'information historique connexe en 2010. Dans un effort pour rendre cette information publique, les archives de la Commission ont été ouvertes en 2014. La Commission de vérité et réconciliation du Canada a publié son rapport final, Honorer la vérité, réconcilier pour l'avenir, le 3 juin 2015.
  • 6Commission de vérité et réconciliation du Canada, Ils sont venus pour les enfants, 15.

Même si le gouvernement les finançait, les pensionnats autochtones étaient opérés par les églises et les membres du clergé remplissaient la plupart des fonctions pédagogiques et administratives. Cette photo fut prise au pensionnat autochtone de Cross Lake au Manitoba en 1940.

Credit:
Affaires autochtones et du Nord du Canada / Bibliothèque et Archives Canada / e011080274

Questions de mise en relation

  1. Comment le Rev. Samuel Rose justifie-t-il la mission et les politiques des pensionnats? Selon lui, quel était leur objectif?
  2. Quel est le langage utilisé dans les différentes citations des leaders religieux pour décrire les Peuples Autochtones et leur culture? Quel est le langage utilisé par ces leaders religieux pour décrire leur propre mission? Que pouvons-nous apprendre du contraste entre leurs motivations et leur justification des politiques? Qu'est-ce que ce contraste peut nous révéler sur leurs biais?
  3. Selon le rapport de la Commission de vérité et réconciliation, quel était le rôle des églises dans le Canada colonial? Est-il possible de réconcilier les deux principaux rôles identifiés par le rapport (une agression et une protection de la culture autochtone)? Si oui, comment?
  4. L'introduction au chapitre 2 donne la définition d'un univers d'obligations d'Helen Fein : le cercle de gens et les groupes « à qui l'ont doit des obligations, à qui les règles s'appliquent et à qui l'on doit faire [amende honorable] pour les préjudices subis ». 1  De quelle façon les leaders religieux de cette lecture auraient-ils décrit leurs obligations envers les Autochtones? Comment proposaient-ils d'exprimer ces obligations? En quoi ces idées entraient-elles en conflit avec les croyances, les attentes et les droits des Autochtones? En fonction de ce que vous avez lu jusqu'ici, qu'est-ce que Mme Fein pourrait dire sur la façon dont les leaders religieux cités dans cette lecture définissaient leur univers d'obligations?
  • 1Helen Fein, Accounting for Genocide (New York: Free Press, 1979), 4.

How to Cite This Reading

Facing History & Ourselves, "Le rôle des églises," last updated October 29, 2019.

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— Gabriela Calderon-Espinal, Bay Shore, NY