Les réponses internationales à la Nuit de Cristal | Facing History & Ourselves
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Les réponses internationales à la Nuit de Cristal

Considérez comment des dirigeants comme FDR, des membres du clergé et des personnes ordinaires dans le monde entier ont réagi à la nouvelle de la Nuit de Cristal.
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  • Histoire de la Shoah

Preparing for the Kindertransport

Vera Gissing, a Holocaust survivor from Czechoslovakia, recalls how her family prepared her for the Kindertransport, a rescue mission that brought thousands of Jewish refugee children to Great Britain.

Les journaux du monde entier ont rapporté les événements de la « Nuit de Cristal ». Le récit suivant que fait Otto D. Tolischus dans le New York Times correspond à celui de nombreux autres journalistes.

Une vague de destructions, de pillages et d’incendies sans précédent en Allemagne depuis la guerre de Trente Ans et en Europe en général, depuis la révolution bolchevique, a balayé la « Grande Allemagne » aujourd’hui alors que des cohortes nationalessocialistes se sont vengées sur des synagogues, des magasins et des bureaux appartenant à des juifs, pour le meurtre d’Ernst vom Rath, troisième secrétaire de l’ambassade d’Allemagne à Paris, commis par un jeune juif polonais. 

Commencés de façon systématique au petit matin, dans presque toutes les villes du pays, les destructions, les pillages et les incendies se sont poursuivis toute la journée. Des foules énormes, mais surtout silencieuses observaient, et la police s’est bornée à réguler la circulation et à procéder à des arrestations massives de Juifs « pour leur propre protection ». 

Toute la journée, les principaux quartiers commerçants ainsi que les rues latérales de Berlin et d’innombrables autres endroits ont résonné de l’éclatement de vitrines brisées tombant sur le trottoir, du bruit sourd des meubles, et des magasins et synagogues incendiés. Même si les incendies des magasins ont été rapidement maîtrisés, ceux des synagogues ont été simplement circonscrits pour les empêcher de se propager aux bâtiments voisins. 1

Partout, les gens étaient scandalisés. Le 12 novembre, l’archevêque de Canterbury, Cosme Gordon Lang, écrivait une lettre au rédacteur en chef du London Times : « Il y a des moments où le simple instinct de l’humanité rend le silence impossible ». Des milliers d’Américains étaient du même avis. Ils ont montré leur indignation lors de gigantesques rassemblements organisés en soutien des Juifs allemands. En rapportant à Berlin ces événements, l’ambassadeur d’Allemagne exprime sa crainte que de telles manifestations ne compromettent l’accord concernant les Sudètes en Tchécoslovaquie. 

Les dirigeants britanniques et français sont très prudents dans leur réponse. Lorsque des membres du Parlement britannique demandent à Neville Chamberlain de condamner le pogrom, celui-ci déclare simplement que les articles des journaux sont « substantiellement exacts ». Il exprime également sa « sympathie profonde et généralisée » à ceux qui « devaient souffrir si durement » en raison du « crime insensé commis à Paris ». 2

Des commentaires similaires des dirigeants français conduisent le rédacteur en chef du journal « La Lumière » d’avertir : « Par le passé, lorsque nous protestions contre les massacres en Éthiopie, en Chine, en Espagne, on nous disait “ Silence ! Vous êtes des bellicistes. ” Lorsque nous avons protesté contre la mutilation de la Tchécoslovaquie, on nous a dit : “ Taisez-vous ! Vous êtes un parti de va-t-en-guerre. ” Aujourd’hui, lorsque nous protestons contre la persécution méprisable de Juifs sans défense, de leurs femmes et de leurs enfants, on nous dit “ Taisez-vous ! La France a peur. ” » 3

La condamnation par les dirigeants aux États-Unis est généralisée et vaste. Des ecclésiastiques de toutes confessions se prononcent contre l’incendie des synagogues ; les politiciens de tous les partis : républicains et démocrates, isolationnistes et interventionnistes, dénoncent la violence à l’égard les juifs et leurs lieux de culte. Franklin D. Roosevelt, président des États-Unis, est le seul dirigeant international à prendre position. Le 15 novembre, six jours après le pogrom, il ouvre une conférence de presse en déclarant : « L’actualité des derniers jours en provenance d’Allemagne a profondément choqué l’opinion publique aux États-Unis. De telles nouvelles de n’importe quelle région du monde produiraient une réaction identique aussi profonde parmi le peuple américain et dans chaque partie de la nation. Je peux à peine croire que de telles choses ont pu se produire au cœur de la civilisation du XXe siècle. »  

Mais la réponse de Roosevelt devait tenir compte des sentiments isolationnistes et antisémites répandus dans son administration, au Congrès et dans le pays. Lors de sa conférence de presse, Roosevelt annonce que les États-Unis retirent leur ambassadeur en Allemagne, mais il ne propose pas de venir en aide des milliers de Juifs qui tentent désespérément de quitter le Troisième Reich.  

Malgré l’indignation contre la violence en Allemagne, il n’y eut pas beaucoup de soutiens pour la levée ou la modification des restrictions migratoires. Depuis le début de la Crise de 29, les Américains s’inquiétaient du chômage et de la situation économique et devaient composer avec l’agitation ouvrière. Ils n’avaient pas voulu affronter le racisme dans leur propre pays et craignaient d’être entraînés dans des conflits étrangers dans lesquels ils estimaient que leur pays n’avait aucun intérêt de s’engager. Toutes ces questions semblaient beaucoup plus importantes que le problème de Juifs apatrides en Europe. Bien que beaucoup soient prêts à accepter quelques écrivains, artistes et scientifiques célèbres de confession juive, ils n’étaient pas disposés à laisser entrer des milliers d’autres juifs aux États-Unis. 

Peu d’Américains étaient violemment antisémites, mais beaucoup estimaient que les Juifs devaient « rester où ils étaient ». L’application des lois américaines sur l’immigration correspondait à ce point de vue. Les États-Unis pouvaient légalement autoriser l’arrivée de 27 000 immigrants en provenance d’Allemagne chaque année. Pourtant, en 1934, le Département d’État n’avait autorisé que 5000 personnes à entrer dans le pays. Environ 6 000 personnes ont été autorisées à entrer en 1935 et moins de 11 000 en 1936.

En février 1939, le sénateur Robert Wagner de New York et la députée du Massachusetts Edith Nourse Rogers ont parrainé un projet de loi basé sur un programme britannique célèbre. De 1938 à 1939, les Britanniques ont admis 10 000 enfants juifs non accompagnés provenant de la « Grande Allemagne » dans le cadre d’un programme connu sous le nom de « Kindertransport » (transport d’enfants). R. Wagner & E Rogers voulaient que le Congrès admette temporairement 20 000 enfants juifs, jusqu’à ce qu’ils puissent rentrer chez eux en toute sécurité. Les 10 000 premiers d’entre eux devaient arriver en 1939 et 10 000 autres en 1940. La plupart de ces enfants étaient trop jeunes pour travailler, ils ne pouvaient donc pas enlever des emplois aux Américains. De plus, leur séjour ne coûterait pas un sou aux contribuables, car divers groupes juifs avaient accepté d’assumer la responsabilité financière de ces enfants. 

Pourtant, le projet de loi rencontra une forte opposition. Gallup, une organisation de sondage, a commencé en janvier 1939 à poser aux Américains la question suivante : « On a proposé d’amener dans notre pays 10 000 enfants réfugiés d’Allemagne, la plupart juifs, pour être pris en charge dans des foyers américains. Le gouvernement doit-il autoriser ces enfants à entrer aux États-Unis ? » 4 61 % des personnes interrogées déclarent en réponse à ce sondage que le gouvernement ne doit pas autoriser ces enfants à entrer dans le pays, 30 % déclarent que les enfants doivent être autorisés à venir, et 9 % ne se prononcent pas. 5

Certains opposants ont demandé pourquoi les enfants chrétiens de pays menacés par les nazis ou les enfants chinois (le Japon avait envahi la Chine en 1935) n’étaient pas inclus. D’autres ont fait des remarques ouvertement antisémites. L’épouse du commissaire américain à l’immigration (et cousine du président Roosevelt) a averti que ces « 20 000 enfants charmants deviendraient très vite 20 000 horribles adultes ». 6 Le projet de loi n’a jamais été adopté. 

À l’été 1940, après le début de la Seconde Guerre mondiale et le bombardement des villes britanniques par les Allemands, le Congrès américain vote en faveur de l’accueil de milliers d’enfants britanniques, la plupart non juifs, dans le pays. 7

Plea for Help for Europe's Jews

Plea for Help for Europe's Jews

Dans le Chicago Daily News du 23 novembre 1938, le caricaturiste Cecil Jensen plaide pour que les dirigeants internationaux viennent en aide aux juifs d’Europe. Crédit photo : Réédition de « Cartoonists Against the Holocaust », avec l’aimable autorisation des coauteurs

Credit:
Reprinted from Cartoonists Against the Holocaust, by permission of the coauthors

Connexions

  1. En quoi les réponses des dirigeants étrangers à la Nuit de Cristal sont-elles différentes par rapport aux réactions à l’expansion allemande en Autriche et dans les Sudètes ? 
  2. Comment le journaliste de La Lumière décrit-il la différence entre la réponse à la Nuit de Cristal et celle aux massacres d’autres nationalités ?  
  3. Comment interpréteriez-vous le sondage Gallup réalisé en janvier 1939 ? Qu’est-ce que suggère l’« univers de contraintes » des États-Unis à l’époque ? 
  4. L’archevêque de Canterbury écrivait : « Il y a des moments où les simples instincts de l’humanité rendent le silence impossible ». Que veut-il dire par « les simples instincts de l’humanité » ? Quels sont les moments dont il parle ?  
  5. Une nation a-t-elle le droit et la responsabilité d’intervenir dans les événements internes d’un autre pays lorsqu’elle estime que ces événements sont injustes ?

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Using the strategies from Facing History is almost like an awakening.
— Claudia Bautista, Santa Monica, Calif