Political Party Platforms in the 1932 German Election
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Retour aux temps difficiles

Comparez les programmes des partis communiste, nazi et social-démocrate lors des élections présidentielles de 1932 en Allemagne, qui était alors en pleine crise économique.  
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  • Droits humains, droits civiques
  • Histoire de la Shoah

Les dirigeants allemands, comme leurs homologues d’autres pays, ont cherché des solutions pour mettre fin à la crise. Et tout comme d’autres dirigeants en 1929, ils ont échoué. Le chancelier de la République de Weimar est cette année-là un social-démocrate, Hermann Müller. Comme celui-ci est incapable de conduire le pays vers la prospérité, le président Paul von Hindenburg nomme un an plus tard un nouveau chancelier. Il choisit cette fois Heinrich Brüning du parti centriste catholique.  

Brüning convainc le président Hindenburg d’invoquer l’article 48 de suspension de la constitution pour permettre au chancelier d’agir rapidement et de manière décisive, sans consulter le Reichstag, et pouvoir faire face à la grave crise économique. Malgré cela, Brüning ne réussit pas à sortir l’Allemagne de la crise.

National Socialism Election Poster

National Socialism Election Poster

Sur cette affiche électorale allemande de 1930, on peut lire : « Travail, liberté et pain : votez national-socialiste ! ». Crédit photo : Heritage Image Partnership Ltd / Alamy

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Heritage Image Partnership Ltd / Alamy

Pour un nombre croissant d’Allemands, la démocratie semble incapable de faire face à l’effondrement économique et seuls les partis politiques les plus extrémistes semblent offrir des solutions claires à la crise. Avec son argument selon lequel, pour mettre fin à la crise, l’Allemagne a besoin d’un gouvernement communiste comme en Union soviétique, le parti communiste recueille des soutiens. Il affirme que le gouvernement doit confisquer aux capitalistes, qui selon lui ne recherchent que leur propre profit, toutes les terres et les industries allemandes. Les communistes ont promis de redistribuer les richesses allemandes pour le bien commun. Les nazis de leur côté rejettent la crise économique en Allemagne sur les juifs, les communistes, les libéraux et les pacifistes. Ils promettent de restaurer la position de l’Allemagne dans le monde et la fierté des Allemands à l’égard de leur nation. Ils promettent également de mettre fin à la crise en faisant campagne derrière des slogans comme « Du travail, la liberté et du pain ! » 

Beaucoup considéraient les nazis comme une alternative séduisante à la démocratie et au communisme. On trouvait parmi eux de riches industriels alarmés par l’expansion du parti communiste. Le message des nazis leur plaisait : il était patriotique, optimiste et énergique. Les communistes et les nazis ont tous deux réalisé des gains importants lors des élections de 1930 au Reichstag.

Nombre de députés au Reichstag de 1928 à 1932

Social-démocrate

  • 1928: 153
  • 1930: 143
  • Juillet 1932: 133
  • Novembre 1932: 121

Centriste catholique

  • 1928: 78
  • 1930: 87
  • Juillet 1932: 98
  • Novembre 1932: 90

Communiste

  • 1928: 54
  • 1930: 77
  • Juillet 1932: 89
  • Novembre 1932: 100

Nazi

  • 1928: 12
  • 1930: 107
  • Juillet 1932: 230
  • Novembre 1932: 196

Nationaliste allemand

  • 1928: 73
  • 1930: 41
  • Juillet 1932: 37
  • Novembre 1932: 52

Hitler obtient la nationalité allemande en 1932 afin de pouvoir se présenter aux élections présidentielles cette année-là. Ses adversaires sont Ernst Thälmann, candidat communiste, et Paul von Hindenburg, président sortant indépendant. 84 % des électeurs se sont exprimés lors de ces élections. Un observateur de l’époque note que lorsque les électeurs se sont rendus aux urnes, chacun pensait à la guerre qui était derrière lui et « devant lui, la ruine sociale : les gens étaient tiraillés entre les communistes à gauche, les nationalistes à droite, et de tout côté, aucune trace de probité et de rationalité, tous les bons instincts se déformant en haine. » 1

Chaque électeur devait déterminer quel parti proposait la meilleure solution aux problèmes du pays. Pour comprendre ces choix, comparez les programmes du parti social-démocrate et du parti communiste avec celui du parti nazi.

Programme du Parti social-démocrate 

Nous nous engageons à maintenir la République et à adopter une politique qui permettra à l’Allemagne de reprendre la place qui lui revient parmi les États libres d’Europe. 

  • Nous soutiendrons la République allemande actuelle afin que la liberté, la démocratie et la justice demeurent dans le cœur de nos compatriotes allemands. 
  • Nous honorerons toutes les obligations politiques et financières de l’Allemagne afin de préserver l’honneur et le respect de notre pays aux yeux du monde. 
  • Nous prévoyons la création d’emplois supplémentaires grâce à un vaste programme de travaux publics.
  • Nous accorderons une indemnité de chômage pendant six mois. 
  • Nous diminuerons les dépenses publiques pour réduire les impôts. 
  • Nous sommes convaincus que les personnes en désaccord avec le parti ont le droit de s’exprimer et d’écrire sans entraves sur ces questions.

Programme du Parti communiste

Nous sommes déterminés à renverser la République oppressive actuelle et toutes ses institutions économiques et sociales. Nous privilégions : 

  • L’abolition de la propriété privée. 
  • La mise en place de programmes de réforme agraire permettant au gouvernement de récupérer les terres et les redistribuer pour le bien commun. 
  • L’étatisation de toutes les forces productives industrielles, pour assurer leur gestion au profit du peuple et non des capitalistes. 
  • Une politique étrangère considérant l’Union soviétique comme un allié contre le capitalisme. 

Au peuple allemand : Votre misère vient du fait que les capitalistes français, britanniques et américains exploitent les travailleurs allemands pour s’enrichir eux-mêmes. Allemands, unissez-vous pour vous débarrasser de ce terrible fardeau. 2

Programme du Parti national-socialiste des travailleurs allemands 

  • Nous exigeons la constitution d’une Grande Allemagne, réunissant tous les Allemands sur la base du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. 
  • Nous exigeons l’égalité des droits du peuple allemand dans ses relations avec les autres nations et l’abrogation du traité de paix de Versailles. . . 
  • Nous exigeons de la terre et des colonies pour nourrir notre peuple et résorber notre surpopulation. 
  • Seuls les citoyens bénéficient des droits civiques. Pour être citoyen, il faut être de sang allemand, la confession importe peu. Aucun Juif ne peut donc être citoyen.
  • Les non-citoyens ne peuvent vivre en Allemagne que comme hôtes, et doivent se soumettre à la législation sur les étrangers. 
  • Le droit de fixer la direction et les lois de l’État est réservé aux seuls citoyens. Nous demandons donc que toute fonction publique, quelle qu’en soit la nature, que ce soit au sein du Reich, dans les Länder ou dans les localités plus petites, ne puisse être tenue par des non-citoyens. 
  • Nous exigeons que l’État s’engage à procurer à tous les citoyens des moyens d’existence. Si le pays ne peut nourrir toute la population, les non-citoyens devront être expulsés du Reich. 
  • Toute immigration non germanique doit être empêchée. Nous demandons que tous les non-Allemands établis en Allemagne depuis le 2 août 1914 soient immédiatement contraints de quitter le Reich. 
  • Tous les citoyens ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. 
  • Considérant les énormes sacrifices de sang et d’argent que toute guerre exige du peuple, l’enrichissement personnel de guerre doit être considéré comme un crime contre la nation. Nous exigeons donc la confiscation de tous les profits de guerre, sans exception. 
  • Nous exigeons une participation aux bénéfices des grandes entreprises industrielles. 
  • Nous exigeons une augmentation substantielle des pensions des personnes âgées. 
  • L’État doit envisager une reconstruction en profondeur de notre système national d’éducation (dans le but de donner à tous les Allemands capables et travailleurs la possibilité de faire des études supérieures et par conséquent de s’émanciper). Les programmes de tous les établissements scolaires doivent être adaptés aux exigences de la vie pratique. L’objectif de l’école est de donner à l’élève, dès le premier signe d’intelligence, une compréhension de la notion d’État. . . 
  • L’État doit veiller à l’amélioration des normes sanitaires nationales en protégeant les mères et les nourrissons, en interdisant le travail des enfants, l’introduction de moyens propres à développer les aptitudes physiques par l’obligation légale de pratiquer le sport et la gymnastique, et par un puissant soutien à toutes les associations s’occupant de l’éducation physique de la jeunesse.
  •  . . Pour faciliter la création d’une presse nationale allemande, nous demandons que
    • Tous les directeurs et collaborateurs de journaux paraissant en langue allemande soient des citoyens allemands. 
    • La diffusion des journaux non allemands soit soumise à une autorisation expresse. Ces journaux ne peuvent être imprimés en langue allemande. 
    • Toute participation financière ou toute influence de non-Allemands dans des journaux allemands soit interdite. . . 
  • Nous exigeons la liberté au sein de l’État de toutes les confessions religieuses, dans la mesure où elles ne mettent pas en danger son existence ou n’offensent pas le sentiment moral de la race germanique. Le Parti en tant que tel défend le point de vue d’un christianisme positif, sans toutefois se lier à une confession précise. Il combat l’esprit judéo-matérialiste à l’intérieur et à l’extérieur, et est convaincu qu’un rétablissement durable de notre peuple ne peut réussir que de l’intérieur, sur la base du principe : l’intérêt général passe avant l’intérêt particulier. . . 3

Le président Hindenburg est réélu par les électeurs allemands, Hitler terminant deuxième. Mais lors des élections au Reichstag tenues dans les mois qui suivent l’élection présidentielle, la popularité des nazis s’est encore accrue.

Élection présidentielle de 1932

Paul von Hindenburg (Indépendant)

  • Suffrages: 19 359 983
  • Pourcentage: 53,0%

Adolf Hitler (Nazi)

  • Suffrages: 13 418 517
  • Pourcentage: 36,8%

Ernst Thälmann (Communiste)

  • Suffrages: 3 706 759
  • Pourcentage: 10,2%

Quels problèmes ont été décisifs dans le résultat des élections ? En examinant la question, l’historien Peter Fritzsche remarque l’existence de deux sortes de files humaines : l’une était composée d’« hommes anxieux devant la bourse du travail » et l’autre, de « soldats d’élite en formation de parade». Au cours des trois premiers mois de 1930, 3,3 millions de personnes sont au chômage; un an plus tard, ce chiffre atteint presque 5 millions et passe à 6,1 millions début 1932. 800 000 électeurs soutenaient le parti nazi en 1928, ce chiffre passe à 6,4 millions en 1930, puis à 13,4 millions en 1932. P. Fritzsche écrit : « Au plus fort de la crise, au cours de l’hiver 1932, plus de 40 % de l’ensemble des travailleurs en Allemagne sont au chômage. La plupart d’entre eux ont depuis longtemps épuisé leurs allocations chômage et subsistent à peine. » 4

La crise est-elle seule responsable du soutien croissant des Allemands au parti nazi ? L’historien Richard Evans pense que l’attrait des nazis a d’autres raisons que leur promesse de mettre fin à la crise. Il écrit qu’en 1930, les électeurs allemands : 

Protestaient contre l’échec de la République de Weimar. Beaucoup d’entre eux aussi, en particulier dans les zones rurales, les petites villes, les petits ateliers, les familles de culture conservatrice, les personnes les plus âgées ou le milieu politique nationaliste de la classe moyenne, ont peut-être exprimé leur désaffection de la modernité culturelle et politique sur laquelle était érigée la république. . . . L’imprécision du programme nazi, son mélange symbolique d’ancien et de nouveau, son caractère éclectique, souvent incohérent, ont largement permis aux gens d’entendre ce qu’ils voulaient et d’éluder tout ce qu’ils pouvaient trouver dérangeant. De nombreux électeurs de la classe moyenne se sont adaptés à la violence et aux agressions nazies de la vie quotidienne en les considérant comme le produit de l’ardeur et l’énergie excessives de la jeunesse. Mais, comme ils allaient bientôt le découvrir par eux-mêmes, c’était bien plus que ça. 5

Après avoir étudié les habitudes de vote en Allemagne dans les années 1920 et au début des années 1930, l’historien Dick Geary écrit : « Le parti nazi était . . . sans aucun doute un « Volkspartei » [parti populaire] recrutant ses membres et ses électeurs parmi un large éventail de groupes sociaux, des deux sexes, aussi bien parmi les plus âgées que parmi les plus jeunes. » 6 Pourtant, note Geary, les nazis n’ont jamais pu remporter la majorité des sièges au Reichstag.

Connexions

  1. Quels partis politiques ont gagné et perdu des sièges en Allemagne entre 1928 et 1932 ? Pourquoi certains partis sont-ils devenus plus attrayants une fois que la crise s’est installée ? 
  2. La République de Weimar a-t-elle été un succès en 1928 ? À quel niveau ? Que signifie mesurer le succès d’une nation ou de son gouvernement ? 
  3. Est-ce significatif que les nazis n’aient jamais occupé la majorité des sièges au Reichstag ? Comment les autres partis auraient-ils pu collaborer pour empêcher les nazis de prendre le contrôle du gouvernement ? Utilisez les données des tableaux de cette lecture pour étayer votre réponse.
  • 1Peter Gay, Le suicide d’une république : Weimar, 1918-1933 (Paris : Gallimard, 1995.), 142.
  • 2Jeremy Noakes & Geoffrey Pridham, éd., Nazism 1919–1945: A Documentary Reader, vol. 1: The Rise to Power 1919–1934 (Liverpool, RU : Liverpool University Press, 1998), 15–16.
  • 3Jeremy Noakes & Geoffrey Pridham, éd., Nazism 1919–1945: A Documentary Reader, vol. 1: The Rise to Power 1919–1934 (Liverpool, RU : Liverpool University Press, 1998), 15–16.
  • 4Peter Fritzsche, Germans into Nazis (Cambridge, MA : Harvard University Press, 1998), 155.
  • 5Richard J. Evans, The Coming of the Third Reich (New York : Penguin, 2005), 265. Reproduit avec l’autorisation de Penguin Press.
  • 6Dick Geary, “Who voted for the Nazis?” History Today 48, no 10 (nov. 1998), accessible le 23 mars 2016.

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— Claudia Bautista, Santa Monica, Calif